Bonsoir Twitter. Vous l'aurez peut être compris si vous avez déjà eu l'occasion de vous promener dans ce blog, mais au risque de me répéter, j'implore votre bienveillance à l'égard de mes articles souvent personnels. J'ai peur que celui suscite des réactions étranges. Voilà tout ! Bonne lecture <3
J'ai décidé d'aborder ici la question de la religion. Non pas de manière polémique ou dans une optique de jugement mais dans une démarche de questionnement.
Il va falloir que je parle de mon vécu - s'il en est un - dans ce "domaine" pour pouvoir exposer ensuite non pas un point de vue mais un ressenti. J'ai pensé à des moments et anecdotes d'enfance et d'adolescence en imaginant ce billet et cela s'est imposé comme une évidence, il faut que j'écrive mon ressenti et que je l'analyse pour le comprendre, dans l'optique d'avoir des réponses aux questions qui me torturent les méninges depuis l'enfance.
J'ai été une "enfant du catéchisme" :
Je suis née dans une famille qui se dit croyante. Mes parents sont baptisés, ont tous deux fait leur communion et se sont mariés à l'église. Cependant, ils ne sont en rien pratiquants et ne m'ont inculqué que des rudiments de religion. Mon baptême était une évidence, celui de mon frère également. Déjà car mes grands parents croient et pratiquent la religion catholique, ensuite parce que mes origines espagnoles maternelles ancraient le baptême dans les traditions.
Lorsque j'ai eu huit ans, ma mère m'a expliqué les choses à peu près comme cela : "Camille, tu sais quand un enfant naît, on le baptise à l'église et c'est la tradition dans la famille. Ça veut dire que nous sommes catholiques et que l'on croit en Dieu et le petit Jésus. A ton âge, tu peux choisir de faire ta communion si tu veux. Pour ça, il faut aller au catéchisme pendant quatre ans. C'est comme une école une heure par semaine où un monsieur t'apprends la vie de Jésus, il faut aussi aller à la messe le dimanche. Tu sais, comme Vanina (copine d'enfance de deux ans mon aînée). Est ce que tu veux le faire ? Ça veut dire que tu choisis de rester catholique et de croire en Dieu."
Quand je l'écris - en souriant un peu - , je réalise qu'elle ne s'en est pas trop mal sortie. Cela doit être difficile à expliquer à une enfant de huit ans, laquelle n'a presque jamais mis les pieds dans une église à part pour le baptême de Machin ou le mariage de Bidule. J'ai donc accepté. Non pas par attachement à la religion dont je ne connaissais quasiment rien mais parce que mes copains d'école m'en avaient déjà parlé. Mon meilleur ami m'avait soufflé qu'après la communion, on faisait une grande fête avec toute la famille. L'idée m'a séduite, je l'avoue.
Le mardi soir après l'école, j'allais donc au catéchisme. Ce n'était pour moi qu'une activité extra scolaire parmi les autres car à huit ans, je pratiquais aussi la danse, l'escalade et le théâtre dans mon village. Le catéchiste n'était autre que Jean-Jacques, le médecin du village d'à côté. Un homme sympathique, pédagogue et drôle. Nous étions un groupe d'enfants majoritairement composé de mes amis d'enfance, ceux de l'école, ceux du village. Déjà là, je me pose la question de savoir pourquoi nous étions tous issus du même milieu social. Dans mon école de village et plus particulièrement dans ma bande d'amis, certains allaient et d'autres n'allaient pas au catéchisme. Les enfants issus de milieux comme le mien à savoir les "fils et filles d'ouvriers, d'employés, d'artisans et de gens simples (comme on les appelle)" allaient au caté et fréquentaient l'école Emile Zola qui était publique. Les enfants de patrons, d'architectes, de médecins et de notaires étaient directement envoyés à St Joseph (école privée catholique du village). Ceux qui n'allaient pas au caté étaient - et l'on peut presque en faire une généralité dans mon école - enfants de profs ou musulmans. Cela peut paraître logique, sauf pour les enfants de profs. Je me suis posé la question très jeune de savoir pourquoi les enfants de professeurs (du public) ne fréquentaient pas les milieux religieux. Aussi et plus fermement encore : pourquoi quand la maîtresse nous parle de l'évolution de l'homme et que nous répondons avoir appris au caté que c'était Dieu qui l'avait créé, ladite maîtresse refusait de répondre à nos questions. J'ai compris plus tard que le professeur qui est une figure d'autorité n'avait peut-être pas le droit d'aller à l'encontre de nos convictions familiales. Tout de même, c'est difficile à analyser quand on a huit ans.
Mes années catéchisme me renvoient à de très bons souvenirs (du moins les trois premières). C'était un lieu de sociabilité où l'on apprenait à se connaître différemment du milieu scolaire. On parlait de Dieu, de Jésus, de la Bible et des évangiles. On prenait un goûter puis on récitait le "Notre Père", enfin, on chantait une chanson qui faisait : Sors de ta maison, marche vers les monts, tu verras la terre promise. Sors de ton pays et marche dans la nuit, tu verras l'aurore divine ... Le souvenir est intact. Mais c'était juste un lieu de sociabilité. Les années caté ont passé et à force d'entendre parler de foi, de Dieu, de Bible ... On devient croyant. Du moins, on croit ce qu'on nous dit puisque d'autres croient aussi et que le catéchiste est une figure d'autorité légitime. Alors je suis entrée dans une communauté religieuse en tant que personne croyante et pratiquante. Seulement, j'avais entre huit et onze ans, est-ce vraiment un âge où l'on peut raisonner ? J'ai fait ma communion à Vrigne-aux-Bois où j'avais toujours habité, dans la paroisse qui de mémoire devait s'appeler Saint Eloi des Fonderies.
J'ai été une ado perplexe, mal dans mes baskets et Dieu n'y pouvait rien.
Entrée au Collège Louis Pasteur, toujours à Vrigne-aux-Bois, j'ai continué à fréquenter les mêmes personnes. Le collège était cependant peuplé des enfants issus des écoles de Vrigne et de celles de Vivier, le village voisin. C'est alors que, toujours bien catholique, j'ai entamé mon adolescence comme on entame un fruit pourri qu'on est obligés de finir d'avaler. Mes parents ont divorcé lorsque j'étais en classe de cinquième et cela n'a rien arrangé à mes maux d'adolescente en pleine crise. Cependant, je côtoyais désormais une plus grande communauté d'amis dont de nouvelles rencontres, majoritairement musulmanes. Les questions fusaient. Je découvrais une autre religion au travers de ces amis qui malgré qu'elle n'était pas la mienne m'intriguait. Je ne sais pas pourquoi cela m'intriguait à ce point. Peut être parce que la majorité de ma famille était foncièrement raciste et islamopohobe mais aussi parce qu'au caté, on m'avait très peu parlé des autres religions. L'année de ma cinquième, je me suis rapprochée d'une personne membre de ma famille éloignée convertie à l'Islam depuis qu'elle avait quinze ans, elle en avait vingt-neuf à cette époque. J'ai apprécié de pouvoir apprendre d'une religion autre que celle qui était la mienne avec cette personne profondément douce, gentille et respectueuse qui a su - contrairement aux catholiques du caté, les discours profondément intolérants du prêtre de ma paroisse ont alimenté ma frustration.- m'expliquer que catholiques et musulmans devaient et pouvaient s'aimer les uns les autres et se respecter. C'est donc la première fois que je suis sortie de bon cœur de la culture raciste qui prédominait dans mon milieu. Cette personne a joué un rôle clé dans la construction de mon "moi" et dans l'acceptation de mon adolescence aussi calamiteuse qu'elle ait été.
Cependant, en grandissant, je me suis rendue compte que ma prétendue religion n'était (pour moi personnellement et dans ma vie) qu'un pansement qui me servait à espérer mieux vivre. C'est triste mais c'est comme ça que ça s'est passé. J'ai d'abord pensé que j'étais simplement écœurée par cette Eglise qui proscrivait le sexe avant le mariage, l'indépendance morale des femmes et que je trouvais intolérante. Je me suis donc intéressée au culte protestant quelques années que je trouvais plus ouvert et moins ostentatoire. J'ai cessé de pratiquer tout en ayant envie de continuer à croire.
Puis il y a eu le lycée. Plus grande communauté, fini l'entre-soi du village. J'ai découvert avec stupéfaction que les gens des villes n'étaient pas massivement religieux. Je me suis rendu compte qu'au final, le problème n'était pas d'être de confession catholique ou protestante mais bel et bien un problème de foi. Quand on en vient - comme ce fut mon cas - à douter de l'existence d'un dieu, c'est qu'on ne croit pas mais plutôt qu'on essaie depuis toujours de se persuader que quelque chose veille sur nous et nous protège de ce que la vie peut nous infliger de mauvais. En revanche, je n'ai jamais jugé les personnes profondément croyantes de mon entourage parce que pour eux cela relève de l'évidence. Évidence qui ne s'était en réalité jamais imposée dans ma vie puisque mes parents m'ont élevé de manière athée. Après avoir cessé de pratiquer, j'ai cessé d'essayer de croire.
L'anecdote qui me blesse encore aujourd'hui est la suivante car j'ai constaté que la religion pouvait empêcher le dialogue. Dans un moment où j'ai voulu confier à l'amie dont j'ai parlé ci dessus, car j'en avais besoin, que j'avais entamé de prendre un moyen de contraception, sa piété religieuse a fait que je n'ai reçu qu'un mutisme pour réponse au lieu de réconfort et de conseils. Cela m'a blessé, j'avais l'impression de démarrer une autre phase de ma construction plutôt que d'aller à l'encontre de la volonté de Dieu. Le dialogue à ce sujet n'est toujours pas possible.
Je suis une adulte en questionnement non religieux qui se questionne profondément sur le fait religieux et sa place dans la société.
J'estime avoir entamé ma vie d'adulte à Reims après avoir quitté le nid familial. Je me suis construite et me construis encore sans la religion. Pour tout vous dire, je vis mieux comme ça. J'ai l'impression de pouvoir décider par moi même de ce qui est bien ou mal sans avoir peur d'aller à l'encontre de quoi que ça soit.
Mes lectures me mènent à m'intéresser de plus en plus au fait religieux mais cette fois ci avec un regard objectif que j'étais bien incapable d'avoir avant tout ça. Je ne ressens plus aucune frustration quant à la religion quelle qu'elle soit. Je me demande cependant si il existe une manière de voir le monde de la même façon selon qu'on soit ou non religieux. Je sais désormais que tous les croyants ne sont pas intolérants et snobs à l'image du prêtre que j'ai connu dans ma paroisse d'enfance. Je sais aussi que l'entente est possible, que religion et politique sont incompatibles. Cependant, je considère la religion, quand elle est bien enseignée, comme l'école du respect de l'autre et de soi même. J'ai pu rencontrer des religieux ouverts et d'une gentillesse à toute épreuve. Des "catholiques de gauche" que je pensais jusqu'à présent inexistants.
J'en viens donc à penser avec conviction que la religion dans son sens le plus strict est une manière de vivre et une manière d'aimer pour ceux qui la pratiquent. Pour ceux qui ne la pratiquent et ne la fréquentent pas, elle est un terrain de questionnement qu'il faut aborder avec bienveillance et respect.
Pour terminer et j'en suis désolée, sur une note négative, je suis tout de même perplexe quant à l'évolution de la pratique religieuse. Les mœurs évoluent et j'ai l'impression que la religion stagne, pas dans ses fondements qui sont bien entendus incontestables mais dans sa pratique et dans ses institutions. Est-on vraiment coupables de ce que l'Eglise, la Mosquée, la Synagogue ou que sais-je condamnent ? Je ne suis pas assez renseignée pour produire un avis objectif. Et si vous avez des réponses à cette question, que vous soyez croyants où non, il y a quelqu'un derrière ce clavier qui veut bien entendre vos réponses.
Douce nuit. Paix et Amour.
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